Chamonix, Dumas et moi

Une invitation à voyager autrement qui ne se refuse pas, d’autant plus qu’elle s’inscrit dans un registre original et raffiné.

Il eut été vain d’ajouter un titre « classique » à la profusion de guides touristiques qui existent déjà. Journaliste cultivée (ce qui est devenu un oxymore !), Catherine Foulsham a sauté le pas et créé sa maison d’édition Atelier des Éclaireurs pour lancer une nouvelle collection « Relire le monde ». L’idée est de découvrir une destination en empruntant une jolie machine à remonter le temps littéraire, riche en extraits judicieusement sélectionnés dans une œuvre d’écrivains voyageurs illustres (Alexandre Dumas, Guy de Maupassant, Gustave Flaubert, Victor Hugo, Pierre Loti…) et d’y agréger une actualisation rigoureuse.

Riche idée d’autant plus qu’elle s’illustre à la perfection à travers une présentation très soignée qui sort aussi des sentiers battus, dans sa mise en page, le choix de l’illustration (dessins de Lauriane Miara pour « Chamonix, Dumas et moi« ), les notes qui enrichissent et précisent certaines données du texte, établissant une passerelle permanente passé-présent et les choix très personnels contenus dans « le carnet de curiosités » en fin d’ouvrage.

Dans « Chamonix, Dumas et moi » Catherine Foulsham, qui connait bien cette destination, signe une série de focus très personnels à travers un abécédaire qui saute à pieds joints de l’Aiguille du Midi à la Verte des Houches en passant par Charousse, Frankenstein, Malabar Princess, Peinture… À propos de ce dernier texte, seul changement au programme : le chalet Alpenrose (1943). Cette maison devenue le musée Marcel Wibault (1904-1998), construite et sculptée par le peintre de montagne, est devenue récemment une chambre d’hôtes très atypique sous la houlette de sa petite fille Emma, architecte d’intérieur… Exit le musée, place à une expérience rare : dormir dans l’atelier d’un artiste entouré de ses œuvres. Catherine Foulsham n’étant pas madame Irma pour lire dans les boules de neiges, on lui pardonne cette nouveauté imprévisible !

Dans sa préface, Catherine rappelle que Gérard de Nerval trouvait en son ami Alexandre Dumas Père (1802-1870) « l’un des plus célèbres écrivains touristes ». Le texte qu’elle a choisi de présenter est extrait des « Impressions de voyage en Suisse » où Dumas, trentenaire, est parti pour raisons de santé. « Nous avons imaginé, explique l’éditrice de « mettre côte à côte le Chamouny de 1832 (déjà très couru !) et le Cham’ d’aujourd’hui, pour mieux souligner l’impermanence, et la fragilité, du monde. Et rappeler que chaque nouveau paysage est une occasion de s’émerveiller.« 

Le beau texte de Dumas commence par ces mots qui donnent le ton des extrêmes qu’il conjugue au plus que parfait dans ce récit poétique et drôle. Il livre son interprétation parfois très romancée d’une réalité qui ne doit jamais entraver son désir de liberté dans l’écriture : « Mon guide fut exact comme une horloge à réveil. À cinq heures et demie, nous traversions le bourg de Martigny, où je ne vis rien de remarquable que trois ou quatre crétins, qui, assis devant la porte de la maison paternelle, végétaient stupidement au soleil levant. » Plus loin, il dépeint avec précision son émerveillement devant les paysages qu’il traverse : « Sur les deux heures, je vis reparaître à l’horizon la même ligne blanche dont je vous ai parlé. Le soleil la suivait comme la première fois, le mont Blanc avait mis sa perruque ; c’est ce qui lui arrive quand il est de mauvaise humeur, et, alors, il ne faut pas s’y frotter. » (Page 40)

En résumé, la collection « Relire le monde » illustre parfaitement son slogan « Des guides intemporels pour réenchanter vos voyages » !

https://atelier-les-eclaireurs.com

Une réflexion sur “Chamonix, Dumas et moi

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